PROMENADE n°5 : Au coeur de la ville (1ere partie)
Point de départ : place
Louise. Parkings: place Poelaert et boulevard de Waterloo; métro
ligne 2 et 6; trams 92 et 94 ; bus n°6, 8,10 et 11.
1-
A l'ombre du Palais de Justice
Palais de Justice de Bruxelles, oeuvre de Joseph Poelaert |
Pas de doute, pour Joseph Poelaert Bruxelles en 1880 est vraiment la nouvelle Babylone. |
Juste derrière le Palais de Justice la jolie place Jean Jacobs a perdu tout un pan de ses belles maisons fin de siècle remplacées par des bureaux anonymes. Mais l'autre côté a heureusement conservé son allure originale.
15 Place Jean Jacobs. Jules Brunfaut (1903) |
Au 15 Place Jean Jacobs, Jules Brunfaut a construit une assez insipide maison de style éclectico-médiéval. Elle n'attirerait guère notre attention si le même Jules Brunfaut n'avait été en 1903 l'auteur du merveilleux hôtel Hannon, l'un des principaux chefs d'oeuvre de l'Art nouveau bruxellois (voir en ouverture de la promenade n°2).
9 place Jean Jacobs -. Georges Hobé (1904) |
En revanche, au 9 Place Jean Jacobs, Georges Hobé, ébéniste de métier, ce créateur de meubles Art nouveau, venu sur le tard à l'architecture, signe à l'âge de cinquante ans (1904) une très belle maison moderniste. Utilisant uniquement briques blanches et pierres blanches, il compose une asymétrie harmonieuse en jouant sur la forme des fenêtres. Au rez-de-chaussée, elles sont en plein cintre avec une porte largement ajourée et garnie de fers forgés. Au premier étage, la large baie vitrée se décompose en trois partie avec un bow-window triangulaire central couronné d'une terrasse (qui, après restauration, a retrouvé son garde-corps en fer forgé de style géométrique).
Au dessus de chaque fenêtre un panneau décoratif en pierre orné de trois cercles énigmatiques. Et comme sa voisinne, la façade se termine étrangement en un demi oval de pierre blanche couronné d'un demi cercle lui aussi très énigmatique.
7 place Jean Jacobs. Georges Pereboom (1902. |
Juste à côté, Georges Pereboom a composé en 1902 une façade dans un esprit moderniste presque identique...en apparence du moins(voir promenade n°2 sa maison personnelle). Tout l'intérêt de ce duo exceptionnel réside donc dans la confrontation immédiate de deux façons d'aborder l'Art nouveau Ici, pas de rigueur géométrique mais plutôt de la poésie: la porte d'entrée en belle boiserie est surmontée d'un très classique figure féminine et, au dessus, de l'auvent, l' imposte est garnie d'une rosace gothique en fer forgé. Pereboom mélange les éléments sans grande rigueur tout à l'opposé de Georges Hobé Cette maison que l'on pourrait qualifiée d'Art nouveau rococo est couronnée comme sa voisinne par un demi oval portant un message: ici une sorte de chandelier en fer forgé à neuf branches qui fait inévitablement penser à une hanoukkia, symbole de la Fête juive des Lumières. Même type de fer forgé sur les côté pour l'ancrage de la façade.
Avant de quitter la place
Jean Jacobs, jetez encore un coup d'oeil aux n° 1 et 3 qui
font angle avec la rue aux Laines. Maisons très étroites et
d'aspect banal mais bourrées de petits éléments Art nouveau.
Suivez ensuite la rue
Wynants puis l'étroite rue du Faucon qui plonge vers le quartier
historique des Marolles et aboutit à la rue Haute, une des plus ancienne rue de Bruxelles, dont le tracé date du Moyen-Age.
2
- La Cité Hellemans
En tournant à gauche dans
la rue Haute, on arrive à la Cité Hellemans (du nom de son
concepteur , l'architecte Emile Hellemans, qui l'a imaginée dès
1905 et mise en chantier entre 1912 et 1915). Ce sont les plus anciens logements
La Cité Hellemans, côté rue Blaes (1915). Dès sa création des magasins avaient été prévus pour assurer le bon fonctionnement de la cité. Ils sont toujours là. |
- sociaux de Bruxelles, conçus dans l'esprit hygiéniste britannique et l'esprit moderniste belge, alliant confort et esthétique Art nouveau (bandes de briques polychromes, oriels, formes et répartition des fenêtres etc). Ils ont remplacé un réseau serrés d'impasses et de rues misérables où habitaient plus de mille personnes. Cet ensemble exceptionnel de 273 logements comprend sept barres parallèles séparées par de larges allées piétonnes qui favorisent l'ensoleillement (chaque appartement a son balcon ou sa terrasse). Les allées ont reçu le nom d'un des petits métiers artisanaux pratiqués dans les Marolles : rues des Ramoneurs, des Chaisiers etc. Les barres sont reliées entre elles par des passages sous arcades qui donnent un caractère monumental à l'ensemble. Conçue pour durer quelques décennies, la cité Hellemans vient d'être entièrement rénovée, restaurée et modernisée tout en conservant sa fonction sociale. Elle fêtera son centième anniversaire en 2015
Rue transversale sous arcades de la cité Hellemans . |
En quittant la cité Hellemans, rejoignez la rue des Capucins qui relie la rue Haute et la rue Blaes. S'y trouve la première école normale réservée aux filles de Bruxelles.
3 - Une école signée Henri Jacobs
3 - Une école signée Henri Jacobs
Détail du préau de l'école normale de la rue des Capucins
|
Ce bâtiment d'aspect sévère cache un véritable trésor artistique: un préau stupéfiant par sa décoration lumineuse totalement Art nouveau. Grandes baies vitrées qui donnent sur une cour intérieure, galerie avec consoles et garde-corps modernistes, nombreux lustres électriques presqu'intégralement dans leur état d'origine, décoration au pochoir des petites voûtes en berceau du plafond et enfin nombreux sgraffites éducatifs signés Privat-Livemont.
Fresque murale de Privat-Livemont glorifiant la ville de Bruxelles |
En semaine, l'école est facilement accessible et il est possible d'obtenir l'autorisation de pénétrer à l'intérieur du préau.
Après cette visite (si vous avez eu un peu de chance!), descendez la rue des Capucins, tournez à droite dans la rue Blaes et puis tout de suite à gauche..
4
- "Le" jardin d'enfants de Victor Horta
Jardin d'enfants au coeur du quartier populaire des Marolles (Victor Horta 1896) |
La construction est
simple: quatre classes seulement et un vaste préau éclairé par une
grande lanterne appuyée sur une légère charpente métallique.
Mais la façade en pierre bleue, pierre d'Euville et pierre blanche
de Gobertange est une véritable leçon sur l'Art nouveau lui-même.
Certaines pierres sculptées ont exigé le travail d'un
ouvrier-artisan pendant trois semaines. La marquise qui protége des intempéries repose sur de magnifiques consoles en
fer forgé ouvragées en coup de fouet. Elles s'écartent en
éventail, symbolisant aux yeux de l'architecte la croissance et
l'épanouissement des enfants.
Marquise en coup de fouet du Jardin d'enfant qui a inspiré Guimard Victor Horta (1896) |
En quittant le Jardin
d'Enfants descendez un peu plus bas dans la rue Saint-Ghislain et,
pour un nouveau coup de coeur, prenez la rue de Nancy, à droite.
5
- Une maison d'artiste en 1900
Autour de 1900, beaucoup d'artistes, peintres, musiciens, sculpteurs ont voulu s'installer dans une maison Art nouveau conçue spécialement pour eux. C'est le cas du jeune peintre Albert Cortvriendt qui serait sans doute totalement oublié aujourd'hui si il n'avait confié la construction de sa maison et de son atelier (6-8 rue de Nancy) à un de ses amis: Léon Sneyers. En 1900, Albert Cortvriendt a
25 ans, Léon Sneyers 23. Ce sont deux jeunes hommes provocateurs et
modernes. Sneyers a été élève de Paul Hankar le grand initiateur
de l'Art nouveau géométrique. Cette première maison en est une
déclinaison personnelle éblouissante. Mais ce sont les éléments décoratifs qui apportent une sorte de magie indéfinissable à cet ensemble ensemble architectural unique.
Double porte d'entrée ajourée du 6 rue de Nancy (entrée principale). Vitraux géométriques inspirés par les masques africains. |
Sgraffite géométriste conçu pour le 6-8 rue de Nancy. par Paul Cauchie, ami de Léon Sneyers et aussi élève de Paul Hankar. |
6 Pause au Palais du vin
Au
début de la rue des Tanneurs, prenez à droite la rue du Miroir puis
à gauche la rue des Tanneurs.En
1892, Ernest Catteau, patron de la société Brias et Cie
(fournisseur de la Cour en pâtisseries, vins et liqueurs), achète l'ancienne Boulangerie économique installée au 60 rue des
Tanneurs. Il la remplace par un grand entrepôt vinicole. Le succès
est tel qu'en 1910 il faut agrandir. L'architecte Fernand Symons
imagine donc pour le 50-62 rue des Tanneurs une superbe
façade en
briques jaunes et pierres blanches de style gothico-Art nouvreau. Le Palais du Vin est délocalisé à la fin du XXème siècle
mais le bâtiment, racheté par le Centre public d'aide sociale de
Bruxelles en 1997, a été restauré intégralement en même temps
que le Marché de Pède voisin qui était spécialisé dans le
textile. A voir particulièrement les grandes halles à barriques de
vin. Spectaculaires
Le Palais du Vin, Ferand Symons (1910) |
Aujour d'hui le Palais du vin est transformé
en ateliers et lieu de restauration très agréable
7- Le fantôme de Victor Horta
Après
avoir reconstitué vos forces, revenez sur vos pas rue des Tanneurs.
Passant par la rue des Brigittines et avant d'arriver à la place de
la Chapelle, il vous faudra traverser une sorte de no
man's land, résultat
de la pire opération urbanistique bruxelloise: la construction de la
jonction ferroviaire souterraine entre la gare du Midi et la gare du
Nord. Les travaux ont duré plus d'un demi siècle pour se terminer
en 1954, laissant un centre ville complètement dévasté, qui ne
s'en remettra jamais vraiment.
Entre vestiges médiévaux, église baroque, bowling et boulevard, la tour qui a remplacé la Maison du Peuple de Horta |
Pour parachever ce désastre, dix ans plus tard, en 1964, le
chef d'oeuvre absolu de Victor Horta, la Maison du Peuple, commandée
par le leader socialiste Emile Vandervelde, fut rasée sur ordre du
même Parti Socialiste, pour réaliser une immonde spéculation
immobilière.
Voici
résumé en trois documents l'histoire de cette tragédieEn 1963, appel international pour sauver la Maison du Peuple de Victor Horta |
L'un des premiers livre remettant à l'honneur l'Art nouveau et particulièrement l'oeuvre de Victor Horta Il est préfacé par Louis Aragon |
Envoi de l'auteur de ce livre, R.H. Guerrand, à l'écrivain belge Charles Bertin. Tout est dit. On est en 1965. |
La rue des Brigittines vous conduit donc à la place de la Chapelle puis à la rue Joseph Stevens. Juste en face de la tour en béton qui a remplacé la Maison du Peuple une "fausse" petite place - les numéros sont ceux de la rue Stevens - a été tardivement rebaptisée "Emile Vandevelde" en mémoire du leader socialiste,de l'architecte... et de la Maison du Peuple. Misérable signe de contrition!!!!
8 De Victor Horta à Paul Hemanus...quels liens ?
Sur cette petite place au 22 rue Joseph Stevens, Paul Hermanus a construit un petit immeuble de rapport tout à fait dans l'esprit Art nouveau. Il faut toutefois remarquer qu'entre le projet initial et la réalisation il y a une sacrée différence. Sous l'influence de Victor Horta?
Projet de façade initial un peu tarabiscoté pour le 22 rue Joseph Stevens. Architecte : Paul Hermanus |
Le 22 rue Joseph Stevens tel que réalisé. En face se trouvait la Maison du Peuple de Victor Horta |
Étrange coïncidence! Paul Hermanus construit face à la Maison du peuple de Victor Horta et Victor Horta meuble l'hôtel particulier d'Anna Boch construit par Paul Hermanus... L'hôtel d'Anna Boch et la Maison du peuple ont été détruits. Que reste-t-il de cette rencontre entre deux architectes? Le 22 rue Joseph Stevens ... peut-être. A vous de juger...
29 rue Joseph Stevens |
Au 29 rue Joseph Stevens on trouve un autre immeuble avec rez-de-chaussée commercial typiquement Art nouveau avec ses majoliques à décor floral vert d'eau, ses gardes corps en fer forgé dessinés en coup de fouet et son élégante légèreté qui contraste singulièrement avec un environnement architectural beaucoup plus dans la tradition bruxelloise.
9 - Horta au quartier du Sablon sur le chemin d'un renouveau
Le Jardin d'hiver de l'Hôtel Frison Victor Horta (1895) |
Et d'abord, l'Hôtel Frison, de Victor Horta, 37 rue Lebeau construit en 1895 pour un avocat (c'est en découvrant cette maison que Charles Buls, bourgmestre de Bruxelles, demanda à
Le fabuleux départ de la rampe d'escalier |
La façade de cet hôtel a été partiellement défigurée en 1955 pour créer une grande vitrine commerciale à l'époque où l'oeuvre de Horta était purement et simplement vouée aux gémonies. Mais l'intérieur est en très bel état avec plusieurs élément remarquables - rampe d'escalier, manteaux de cheminées, portes et poignées, mosaïques flamboyantes au sol et surtout la grande verrière vitraillée du Jardin d'hiver (superbement restaurée).
Enfin de délicat travaux de restauration, effectués par le précédent propriétaire, ont permis de redécouvrir des peintures murales exécutées par la maître de l'art nouveau.
La cheminée et les grandes glace du salon du premier étage |
10- Le dernier sgraffite commercial...
A voir aussi, dans le même quartier, le seul sgraffite commercial bruxellois qui à survécu aux injures du temps : l'enseigne de la boulangerie
De Zonne Bloem, 40 rue des Minimes (pour l'instant magasin de livres d'art).
Plusieurs maîtres de l'Art nouveau ont décoré des façades commerciales. Aucune n'a survécu sauf celle-ci |
11 - La pause au Perroquet
Un des sgraffites du Perroquet |
Le comptoir du Perroquet |
Vous avez vu ce qui est devenue le Falstaf!
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